Pendant le confinement, le dialogue social continue…par téléphone. Le secrétaire d’Etat en charge de la Fonction publique Olivier Dussopt a ainsi réuni le 2 avril les neuf organisations syndicales de fonctionnaires et les représentants des employeurs territoriaux. Au cours de ces rendez-vous en audioconférence (qui devraient se tenir dorénavant chaque semaine jusqu’à la fin de la crise sanitaire), plusieurs questions liées à la mobilisation des agents territoriaux dans la lutte contre la pandémie de covid-19 ont été abordées. Saluant « le travail important, la qualité d’écoute, la réactivité et l’efficacité du secrétaire d’Etat et de son cabinet », Philippe Laurent, le porte-parole de la Coordination des employeurs publics territoriaux (1) a souligné le 3 avril dans un communiqué que les nombreux problèmes que rencontrent les collectivités dans la période actuelle doivent trouver des réponses rapides « afin de continuer à se situer dans des règles de droit ». Réponses dont le maire de Sceaux (Hauts-de-Seine) souhaite, par ailleurs, « qu’elles ne viennent pas obérer la reprise normale des services ».
Pour Philippe Laurent, les indications données par Olivier Dussopt au cours de cette réunion « vont dans le sens souhaité » par les collectivités, même si les textes attendus sont encore en préparation ou en cours d’arbitrage.
Prime exceptionnelle défiscalisée et désocialisée
Il s’agit notamment de rendre possible le versement « sur décision souveraine de la collectivité » d’une prime exceptionnelle pour les agents engagés sur le terrain dans le cadre des plans de continuité d’activité. Les élus demandent que cette prime soit accordée « hors RIFSEEP » (régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel) et qu’elle soit à la fois défiscalisée et désocialisée. Selon la Coordination des employeurs territoriaux, cette revendication « a été entendue et pourrait trouver des éléments de réponses positifs dans les prochains jours ». Notons que sur ce sujet, l’Association des DRH des grandes collectivités (ADRHGCT) s’est également positionnée en faveur d’une prime exceptionnelle dans une tribune en date du 5 avril. « Il y a urgence à cesser les tergiversations juridiques et à créer une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales pour tous les agents publics impliqués et mobilisés dans la crise exceptionnelle que nous traversons », affirme notamment Johan Theuret, président de l’ADRHGCT. Pour l’heure, l’ordonnance du 1er avril 2020 prévoit le versement d’une prime exceptionnelle et défiscalisée aux seuls salariés du privé.
En outre, la possibilité de verser des « frais de mission exceptionnels » aux agents engagés sur le terrain a été évoquée le 3 avril. Les employeurs ont également demandé au gouvernement de publier au plus vite le décret « télétravail », un texte « qui donnera une base réglementaire aux pratiques actuellement mises en œuvre ». Autre sujet important : les congés « forcés » imputables sur la période de confinement. Pour Philippe Laurent, si cette possibilité devait être mise en œuvre, elle devrait relever de la décision de chaque collectivité « avec des limites précises » et n’être « en aucun cas une obligation ». Enfin, les employeurs territoriaux ont évoqué la perspective de caractériser le covid-19 comme maladie professionnelle pour les agents territoriaux qui auront été exposés.
La question des « missions essentielles »
Plusieurs élus ont soulevé, lors de cette réunion, la question des missions qui, sans être indispensables, sont jugées « essentielles ». Explication : un certain nombre de missions indispensables sont listées et permettent de mettre en place les PCA (plans de continuité de l’activité). Dans ce cadre, les agents qui participent à ces missions ne peuvent refuser de travailler. Mais il existe aussi, ont souligné des maires, des activités qui, bien que n’étant pas listées comme indispensables, sont néanmoins « essentielles » et devront être effectuées avant le déconfinement (par exemple le nettoyage et la désinfection des gymnases, la tonte des stades, l’entretien des espaces verts). Les agents sont-ils en droit de refuser ces missions ? Olivier Dussopt a reconnu le problème, dû au fait que les PCA n’ont pas été pensés pour des crises aussi longues que celle-ci. II n’a, pour l’instant, pas apporté de réponse à cette question.
Les demandes des syndicats
Côté syndical, les représentants des agents ont essentiellement demandé au secrétaire d’État lors de la réunion du 2 avril que soient précisées les règles concernant le télétravail (un décret devrait être présenté devant le Conseil d’État à la mi-avril), l’encadrement des horaires et des rythmes de travail, ou encore les modalités de récupération, de compensation des heures supplémentaires et d’alimentation des comptes RTT. Une demande de prise en charge financière par l’employeur du surcoût lié au télétravail (achat de matériel, dépassement de forfait téléphonique) a également été formulée par certains représentants des personnels.
Dernière minute : dans un avis rendu en fin de matinée, l’Académie de médecine s’est dite favorable à ce que les salariés travaillant pour des activités « indispensables » et atteints par le coronavirus puissent être considérés comme étant en maladie professionnelle. Le gouvernement s’est déjà engagé à ce que les soignants qui seraient dans ce cas puissent voir reconnue la maladie professionnelle. L’Académie va plus loin en évoquant les secteurs de l’alimentation, des transports en commun ou de la sécurité. Pour les agents des collectivités, elle recommande que les agents soient déclarés en « affection imputable au service ».
Source : MAIREinfo – Edition du lundi 6 avril 2020