Sur l’essentiel du texte, à savoir l’instauration d’un pass vaccinal en lieu et place du pass sanitaire, le Conseil constitutionnel n’a rien trouvé à redire. Dans la décision rendue vendredi, il juge conforme à la Constitution l’instauration d’un pass vaccinal.
Pass vaccinal
C’était en effet le principe même de ce pass vaccinal qui était remis en question par les députés et sénateurs qui ont saisi les Sages. Ceux-ci ont répondu en substance que la Constitution impose à l’État un devoir de « protection de la santé ». Bien que les dispositions prévues par la loi « portent atteinte à la liberté d’aller et de venir et, en ce qu’elles sont de nature à restreindre la liberté de se réunir, au droit d’expression collective des idées et des opinions », elles leur paraissent conformes à cet objectif constitutionnel de « protection de la santé », d’autant que les mesures sont bornées dans le temps (jusqu’au 31 juillet 2022 maximum) et « réservées (…) à des activités qui mettent en présence simultanément un nombre important de personnes en un même lieu ».
Pour le Conseil constitutionnel, qui contredit ainsi l’avis de certains parlementaires requérants, ces dispositions « ne peuvent être regardées (…) comme instaurant une obligation de vaccination ».
Toutes ces dispositions « opèrent une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles » et sont donc, selon les Sages, conformes à la Constitution.
Vérifications d’identité
Autre sujet de contestation : la possibilité pour les gestionnaires d’ERP de procéder à une vérification d’identité des personnes présentant un pass vaccinal. Les parlementaires qui ont saisi les Sages estimaient que cette mesure revient à « conduire à déléguer à des personnes privées des missions de police administrative », et qu’elle porte en outre atteinte au droit au respect de la vie privée des personnes.
Le Conseil constitutionnel confirme qu’il est inconstitutionnel de déléguer à des personnes privées les missions de police administrative, mais juge qu’il ne s’agit, ici, pas de cela : la loi se borne à permettre une « vérification de concordance » entre le pass et un document officiel, vérification qui ne peut avoir d’autre conséquence « que l’impossibilité pour [la personne] d’accéder à ce lieu ». Ces mesures ne présentent donc aucun caractère inconstitutionnel.
Repentir
Sur la nouvelle procédure de « repentir » (lire article ci-dessus), les Sages ne voient pas non plus de difficulté constitutionnelle. Les parlementaires requérants affirmaient que cette disposition, qui permet de passer l’éponge sur des délits liés à l’utilisation du pass sanitaire ou vaccinal, si la personne incriminée se fait vacciner dans les trente jours, porte atteinte « au principe d’égalité devant la loi pénale ». Les Sages répondent : « Ces dispositions s’appliquent à toute personne ayant commis l’une des infractions visées, quelle que soit la procédure susceptible d’être mise en œuvre à son encontre. Elles n’instaurent ainsi en elles-mêmes aucune distinction entre les justiciables. ».
Réunions politiques : pass sanitaire interdit
La seule mesure censurée par le Conseil constitutionnel est la possibilité donnée par la loi aux organisateurs de réunions politiques d’en subordonner l’entrée à la présentation d’un pass sanitaire. Rappelons que le Conseil constitutionnel, dans plusieurs décisions précédentes, avait interdit que la loi impose la présentation d’un pass sanitaire dans les réunions politiques. Le texte adopté contournait cette décision en permettant aux organisateurs, de façon volontaire, de le faire quand même.
Les Sages l’ont refusé. S’ils reconnaissent que cette mesure poursuit l’objectif constitutionnel de protection de la santé, en tentant d’empêcher des « clusters » à l’occasion des grands rassemblements politiques, ils jugent que la rédaction de la loi est trop floue et trop large, puisqu’elle ne fixe aucune condition. La loi adoptée disposait en effet simplement que « la personne responsable de l’organisation d’une réunion politique peut en subordonner l’accès à la présentation » d’un pass sanitaire, sans autre précision. Le texte ne précisait pas qu’une telle mesure ne devait être prise que « dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre l’épidémie de covid-19 », ni fixait pas de conditions et ni précisait pas que « ces mesures soient strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu ». C’est cet oubli rédactionnel qui rend ces dispositions « contraires à la Constitution ». Les Sages les ont donc retirées de la loi, et aucun organisateur de meeting politique, pendant la campagne, ne pourra imposer de pass sanitaire.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du lundi 24 janvier 2022