Depuis ce matin, 8 heures, l’attestation de déplacement dérogatoire (ADD) est disponible au format numérique, « en complément du dispositif papier toujours valide ». Pour la générer , il suffit de se rendre sur le site du ministère de l’Intérieur – ce n’est pas une application – et de remplir les informations d’usage, à savoir son nom, son prénom, sa date et son lieu de naissance mais aussi son adresse complète. Comme sur l’attestation papier, il convient ensuite de sélectionner un des sept motifs de déplacement autorisés pendant la période de confinement, en cochant la case correspondante, et d’indiquer la date et l’heure de sortie (la date et l’heure de création de l’attestation sont également inscrites sur l’attestation afin d’éviter les fraudes).
Après la validation de ces informations, une attestation au format PDF est alors générée sur son smartphone ou son ordinateur (ne pas oublier de se l’envoyer par mail). En cas de contrôle, il suffit de présenter, en plus d’une pièce d’identité, votre smartphone et de zoomer sur le QR code de l’attestation, que les autorités se chargeront de scanner. « Grâce au code QR, les policiers et les gendarmes n’auront pas besoin de prendre le téléphone en main, précisait le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner le 2 avril. Il leur suffira de scanner l’écran » pour limiter les risques de transmission du virus.
« Personne ne pourra collecter les données des usagers »
« Il n’y aura pas de fichier. Personne ne pourra collecter les données des usagers », expliquait le même jour, le ministre de l’Intérieur au Parisien. « C’est une traduction fidèle du dispositif déclaratif au format papier : aucune donnée saisie n’est transmise aux serveurs du gouvernement, a précisé plus tard le ministère. Les données saisies servent uniquement à générer localement, sur l’appareil de l’usager, l’attestation sous forme numérique. »
Une garantie qui a, semble-t-il, contribué au changement de regard du gouvernement sur le sujet. Le 19 mars, Christophe Castaner avait, en effet, catégoriquement rejeté l’idée d’une attestation de déplacement dérogatoire numérique afin que celle-ci n’altère pas la protection des données personnelles des usagers. Le ministre de l’Intérieur accusait notamment « les sociétés qui ont proposé d’éditer les formulaires » de vouloir « piller » les données des utilisateurs.
Il ne s’agissait, par ailleurs pour le ministre, de « ne pas faciliter la vie des Français » afin qu’ils respectent davantage les règles du confinement, en vigueur au moins jusqu’au 15 avril. Le ton s’est désormais adouci : « Les Français se sont approprié les règles du confinement, il convient donc de leur donner un peu de souplesse avec cet outil », a commenté Christophe Castaner.
Quel scénario pour le déconfinement ?
Cette nouveauté est instaurée alors même que le gouvernement multiplie les déclarations sur sa stratégie – pas encore déterminée – de déconfinement. Le 1er avril, le Premier ministre Édouard Philippe, en personne, a évoqué devant les députés les scénarios sur lesquels il planche actuellement et promis qu’une ébauche serait présentée dans les prochains jours.
L’exécutif avançait ainsi, pour la première fois, que la voie d’un déconfinement « progressif » – pilotée par Jean Castex, maire de Prades (Pyrénées-Orientales), président de l’Agence nationale du sport (ANS) et délégué interministériel aux Jeux olympiques – pourrait être privilégiée. « Nous avons demandé à plusieurs équipes de travailler sur cette question du déconfinement, en étudiant l’opportunité, la faisabilité d’un déconfinement régionalisé ou sujet à une politique de tests – et si oui laquelle – ou en fonction de classes d’âges », a expliqué le Premier ministre. Qui martelait le lendemain sur TF1 : « Le confinement n’est pas prévu pour demain matin ». Une autre façon de dire que la prolongation du confinement après le 15 avril est inévitable ?
Un déconfinement régionalisé ? Par classe d’âge ?
Les modalités du déconfinement restent donc à écrire. Selon Le Parisien, la source d’inspiration du gouvernement français serait un rapport rédigé par un groupe de réflexion libéral américain. Son nom ? « A road map to reopening » (« Une feuille de route pour la réouverture »).
Comme Édouard Philippe l’a laissé entendre la semaine dernière, les auteurs de ce document préconisent un déconfinement « État par État », relate le journal. En France, les régions touchées en premier pourraient ainsi être déconfinées les premières (le pic épidémiologique pourrait être atteint aujourd’hui en Île-de-France), avec quelques conditions importantes : un nombre de cas en recul depuis au moins 14 jours et des services de réanimation désengorgés. En parallèle dans ses régions, il faudrait tester toutes les personnes qui présentent des symptômes.
Le critère de l’âge est également à l’étude : les plus vulnérables (personnes de plus de 60 ou 65 ans et les personnes à risque) pourraient ainsi être confinés plus longtemps que les plus jeunes ou les personnes immunisées. Encore faudrait-il disposer de milliers de tests sérologiques (prises de sang qui permettent de savoir si le patient a développé des anticorps contre le covid-19) que la France n’a pas pour l’instant, constate franceinfo.
Masques : le rétropédalage du gouvernement
En attendant une stratégie de déconfinement claire et précise, le gouvernement a rétropédalé sur le rôle que jouent les masques pour freiner l’épidémie. Alors qu’il répétait que le port des masques dits alternatifs était, au choix, « pas nécessaire » ou « inutile » pour les personnes non infectées, la « doctrine » de l’exécutif, confronté à une pénurie de masques, a été fragilisée par la position de l’Académie de médecine. Cette dernière a indiqué, le 3 avril, que le « port généralisé d’un masque par la population constituerait une addition logique aux mesures barrières actuellement en vigueur ».
Pour ne pas priver le personnel hospitalier, dont les besoins sont estimés entre 24 et 40 millions de masques médicaux (FFP2 ou chirurgicaux) par semaine selon Libération, l’Académie évoque surtout les masques dits « alternatifs » en tissu, ceux que l’on peut fabriquer soi-même (un modèle de masque barrière est validé par l’Afnor). « Si nous avons l’accès à des masques, nous encourageons effectivement le grand public, s’il le souhaite, à en porter, en particulier ces masques alternatifs qui sont en cours de production », a finalement déclaré Jérôme Salomon, directeur général de la santé, ce vendredi.
La semaine dernière, le président de la République a annoncé le lancement d’une production massive de ces masques alternatifs en tissu. 500 000 masques devraient être produits chaque mois pour équiper les professions non médicales en contact avec le public (caissiers, pompiers, policiers). Comme en Lombardie (Italie), le port du masque pourrait être rendu obligatoire au moment du déconfinement en France, selon RMC.
Source : MAIREinfo – Édition du lundi 6 avril 2020