L’enquête menée par le CEVIPOF pour le compte de l’AMF auprès de 15 308 Français de métropole vient renverser certaines idées reçues concernant la fracture territoriale.
L’explication la plus courante du mouvement des gilets jaunes est d’en revenir à la géographie pour montrer cartes en main que les périphéries rurales, de plus en plus dépourvues de services privés ou publics, s’opposent désormais à des agglomérations métropolitaines attractives qui concentrent les richesses et sont propices à la gentrification, autrement dit à l’embourgeoisement.
On est cependant passé trop vite du constat à l’évolution sociale, du fait géographique à l’intention culturelle assumée.
Au terme de ce raisonnement, les métropoles ont été présentées comme des centres qui attirent toutes les convoitises, notamment les jeunes diplômés ouverts sur le monde, alors que le rural ne serait plus qu’un espace de relégation pour des personnes qui n’auraient pas la possibilité d’aller ailleurs.
Si l’absence de services de proximité en milieu rural est bien confi rmée par l’enquête, celle-ci ne produit cependant pas une désaff ection pour la campagne. Le rural reste très demandé alors que les grandes villes ne font plus rêver et constituent des destinations imposées par leur off re d’emplois ou leurs ressources éducatives.
Bien plus, c’est toujours en milieu rural que le niveau de satisfaction à l’égard des élus est le plus élevé alors que le bilan des équipes municipales dans les grandes villes est bien plus faible.
Cette note présente les caractéristiques les plus remarquables qui distinguent dans l’enquête les communes rurales des autres communes.
Voici les principaux enseignements :
L’analyse des réponses données par les enquêtés habitant le monde rural montre que ce dernier reste un espace où la satisfaction à l’égard du maire et de l’équipe municipale est en moyenne bien supérieure à ce que l’on observe dans l’espace urbain.
Ce résultat vient paradoxalement expliquer la crise que traversent les maires des communes rurales, confrontés à des attentes nombreuses avec des ressources en déclin et des mains de plus en plus liées par les intercommunalités auxquelles seule une minorité d’enquêtés semblent attachés.
Les conflits n’y sont pas médiatisés par des services administratifs ni des équipes d’adjoints spécialisés comme dans les grandes villes. C’est peut-être le signe que la démocratie locale y reste bien vivante.
Du reste, la proportion d’habitants déclarant avoir déjà participé à des activités concernant la vie de leur commune y est plus élevée qu’ailleurs : 25 % contre 16 % en moyenne et 12 % dans les villes de 200 000 habitants et plus. C’est sans doute à ce niveau territorial que peut se régénérer la démocratie représentative.