Face à la propagation rapide du virus covid-19 en France, le gouvernement a annoncé hier, à l’issue d’un Conseil de défense, un durcissement des mesures de « freinage » de l’épidémie, avec notamment une baisse de 5 000 à 1 000 de la jauge en matière de rassemblements interdits.
Le point sur la situation
En un week-end, le nombre de cas détectés en France a bondi de 423 vendredi à 1 126 dimanche soir. Dix-neuf décès sont à déplorer. Les principaux territoires impactés restent l’Oise, la Haute-Savoie, le Morbihan, le Haut-Rhin, auxquels s’ajoutent, depuis hier, la Corse du sud. Dans ces départements, les rassemblements sont partiellement ou totalement interdits et écoles et crèches resteront fermées sur tout ou partie de ces départements – pour la Corse, uniquement sur la ville d’Ajaccio. Dans cette ville, les rassemblements de plus de 50 personnes sont interdits.
L’État et les élus ne sont pas épargnés par l’épidémie : dans l’Oise, le préfet et une partie de son cabinet sont confinés. Plusieurs élus, dont le maire de Crépy-en-Valois, celui de La Balme-de-Sillingy ou encore un membre de la majorité municipale de la ville du Bourget (Seine-Saint-Denis) sont infectés. Quatre députés sont également malades.
La stratégie du gouvernement : le « freinage »
Face à cette diffusion du virus, le gouvernement a arrêté sa stratégie, basée sur deux maîtres mots : « différenciation et proportionnalité ». Autrement dit, plutôt que des mesures générales, prendre un maximum de « mesures de freinage distinctes d’un territoire à l’autre », a expliqué hier soir le ministre de la Santé, Olivier Véran.
Ce qui n’empêche pas certaines mesures d’ordre général. En particulier, l’interdiction de « tous les rassemblements de plus de 1000 personnes », à l’exception de ceux qui sont « utiles à l’activité de la nation », a précisé le ministre. Il a donné quelques exemples, mais la liste n’est pas exhaustive : les concours, les manifestations et l’usage des transports en commun ne sont pas concernés par l’interdiction.
Il est à noter que le ministre a bien dit « tous les rassemblements », alors que jusqu’à présent, seuls les rassemblements en milieu « confiné » étaient visés. Cela laisse à penser que les rassemblements de plus de 1000 personnes même en extérieur seraient interdits – mais cela reste à confirmer.
Le ministre a également annoncé une « adaptation » du système de santé, avec d’abord un décret qui sera signé aujourd’hui visant à déplafonner le nombre d’heures supplémentaires qui peut être effectué par le personnel soignant dans les hôpitaux ; et des mesures destinées à assouplir le recours à la télémédecine. En temps normal, il n’est pas possible de recourir à une téléconsultation si l’on n’a pas eu au moins une consultation « présentielle » (en face à face) depuis moins de 12 mois. Cette règle sera levée aujourd’hui.
En dehors de ces mesures d’ordre général, des mesures particulières sont prises au cas par cas par les préfets et les directeurs régionaux des agences de santé : fermetures de classes ou d’établissements scolaires, interdiction ponctuelle de tel évènement… À l’échelle du pays, ce sont quelque 300 000 élèves qui resteront chez eux ce lundi matin.
Élections municipales : adaptations locales
Concernant le déroulement des élections municipales – dont le gouvernement affirme toujours qu’il est hors de question de les reporter – des mesures spécifiques sont, là aussi, annoncées au cas par cas. À Mulhouse par exemple, la maire, Michèle Lutz, a donné hier une conférence de presse pour annoncer les mesures de prophylaxie qui seront prises les 15 et 22 mars dans les bureaux de vote : distribution de gants chirurgicaux aux électeurs, désinfection systématique des machines à voter et des stylos servant à l’émargement après chaque vote… À Ajaccio, la municipalité a annoncé que les bureaux de vote seraient ouverts une heure de plus (jusqu’à 19 heures au lieu de 18 heures) pour tenter de lisser l’afflux d’électeurs.
Inquiétudes pour certains secteurs de l’économie
La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a fait savoir hier que 900 entreprises ont demandé à ce jour une autorisation d’utiliser le chômage partiel, ce qui concerne quelque « 15 000 salariés ».
Les inquiétudes les plus vives concernent les secteurs du tourisme, du transport aérien et de l’événementiel. Ce dernier secteur, en particulier, pourrait être décimé par cette crise, avec l’annulation en chaîne de centaines d’événements – concerts, festivals, congrès, salons, etc. Les associations porte-parole de ce secteur parlaient ce week-end de « cataclysme » et de la possibilité de voir périr « des centaines d’entreprises » représentant « plus de 330 000 emplois ». Elles en appellent à un « plan d’urgence de l’État » pour les soutenir.
Les intermittents du spectacle sont, à ce jour, les plus menacés par cette crise, parce que leurs indemnités ne sont versées que s’ils effectuent un certain nombre d’heures de travail dans le mois. Les annulations en chaîne pourraient priver de revenus, à long terme, des dizaines de milliers d’entre eux.
Ce lundi matin, ce sont maintenant des craintes de krach boursier qui alourdissent encore la situation. Après une chute de plus de 4 % vendredi, le CAC40 perdait, ce matin à 10 h, plus de 7 %, dans le sillage des bourses asiatiques.
Source : MAIREinfo – Édition du lundi 9 mars 2020