Cette ordonnance était prévue par la loi dite Engagement et proximité du 27 décembre 2019, dont l’article 105 autorisait le gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure permettant d’améliorer le droit à la formation des élus locaux et elle était donc très attendue.
État des lieux avant l’ordonnance
Rappelons que la formation des élus locaux est aujourd’hui organisée autour de deux cadres distincts. D’une part, les formations liées à l’exercice du mandat qui sont financées par la collectivité et ne peuvent être dispensées que par des organismes spécifiques, agréés par le ministère chargé des collectivités locales.
D’autre part, le DIF (droit individuel à la formation des élus locaux), qui recouvre un champ plus large – formations en lien avec le mandat mais aussi formations permettant la reconversion professionnelle des élus après leur mandat. Dans le cadre du DIF, les élus acquièrent 20 heures de droit à la formation par année de mandat, dès la première année de mandat, et ces formations ne sont pas payées par la collectivité mais par un fonds alimenté par des cotisations prélevées sur les indemnités de tous les élus locaux.
Ce dispositif, en l’état, ne donnait pas toute satisfaction, comme l’a souligné un rapport de l’Inspection générale de l’administration publié en février dernier. Le recouvrement des cotisations du DIF s’avérait « peu efficace », le prix des formations s’est envolé (notamment parce que le DIF était exprimé en heures et non monétisé et que certains organismes de formation, peu scrupuleux, en ont profité et ont donc contribué à « assécher » le fonds). D’autre part, avait constaté le rapport, nombre de « petites collectivités ont éprouvé des difficultés à financer à elles seules la formation de leurs élus », et « le périmètre des formations relevant spécifiquement du champ des élus locaux doit dorénavant être mieux précisé, par le biais d’une doctrine claire et partagée. »
Ce que prévoit l’ordonnance
Ce texte composé d’une vingtaine d’articles vise donc à améliorer tout ou partie de ces dysfonctionnements. Il contient de nombreuses modifications des règles : les droits acquis pour le DIF au cours du mandat ne seront plus exprimés en heures mais en euros et les cotisations pour le DIF seront désormais prélevées à la source. Le fonds continuera d’être piloté par la Caisse des dépôts afin de garantir son équilibre financier mais, sur ses propositions, le ministre en charge des collectivités territoriales pourra être amené à mettre en œuvre de nouvelles règles pour rétablir cet équilibre.
Les mutualisations entre communes en matière de formation des élus sont encouragées, notamment la gestion de la formation à l’échelle des EPCI (qui n’est toutefois toujours pas obligatoire). Les formations qui seront prises en charge par les EPCI ne pourront concerner que l’exercice du mandat.
Autre nouveauté : le texte permet aux élus de participer eux-mêmes « au financement de formations organisées au titre de leur DIF d’élu local, en mobilisant les droits à formation monétisables dont ils disposent par ailleurs au titre de leur parcours professionnel » ou « via leurs fonds personnels » – mais, dans ce cas, uniquement pour les formations liées à leur reconversion professionnelle.
Par ailleurs, les cinq premiers articles du texte permettent aux collectivités de participer au financement des formations liées au DIF. « Cette participation doit être prévue par une délibération et ne peut concerner que les formations liées à l’exercice du mandat.»
Rappelons en effet que les collectivités conservent l’obligation de prévoir un budget formation fixé entre 2 % et 20 % du montant théorique des indemnités de fonction de leurs élus.
Quelques « interrogations » chez les élus
Lors de l’examen de ce texte par le Conseil national d’évaluation des normes (Cnen), le 10 décembre dernier, les représentants de l’État ont rappelé que ce texte avait fait l’objet d’une importante concertation avec l’AMF et qu’il tient compte des remarques de celle-ci. Les représentants des élus ont d’ailleurs donné unanimement au projet d’ordonnance un avis favorable.
Néanmoins, les élus ont fait part, en séance, de certaines « interrogations », se demandant si cette réforme n’allait pas conduire à « une réduction substantielle des droits à la formation des élus »
La concertation avec les associations d’élus se poursuit toutefois sur la mise en œuvre pratique du dispositif et les décrets d’application.
Mais, d’ores et déjà, le contrôle plus strict des organismes de formation, la possibilité de suspendre, puis de retirer les agréments en cas de manquements graves, le pilotage régulier du fonds DIF et la mise en place du nouveau CNFEL et d’un conseil d’orientation placé auprès de lui, dans lesquels les élus auront toute leur place et formuleront des propositions pour définir un répertoire de formations et une meilleure évaluation de la qualité de celles-ci, sont des mesures qui vont permettre de développer la formation des nouveaux élus (par les budgets « formation » des collectivités locales et par le DIF) sur des bases plus claires.
Certaines dispositions de l’ordonnance n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2022 et d’autres nécessitent un décret d’application.
Télécharger l’ordonnance et le rapport.
Source : MAIREinfo – Edition du vendredi 22 janvier 2021