Tant que les décrets d’application de la loi du 30 décembre 2023 n’étaient pas parus, les dispositions les plus importantes de ce texte étaient inapplicables, en particulier la possibilité de promouvoir les secrétaires de mairie en catégorie B. Plusieurs parlementaires, au premier rang desquels le sénateur Cédric Vial, ainsi que l’AMF, se sont mobilisés ces dernières semaines pour demander au gouvernement la publication de ces décrets. En effet, comme l’explique ce matin à Maire info la secrétaire générale de l’AMF, Murielle Fabre, « sept mois après la loi, les maires ne pouvaient toujours pas mettre en œuvre ces dispositions ».
Ce que dit la loi
Pour mémoire, la loi du 30 décembre 2023, en neuf articles, réforme en profondeur le métier de secrétaire de mairie, d’abord en créant, pour les communes de moins de 3 500 habitants, la nouvelle fonction de « secrétaire général de mairie » (SGM). Dans les communes de moins de 2 000 habitants, ce secrétaire général de mairie doit être au minimum classé en catégorie B, et en catégorie A dans les communes de plus de 2 000 habitants.
Pour cela, la loi permet à titre exceptionnel aux agents de catégorie C exerçant déjà la fonction de secrétaire de mairie d’accéder directement à la catégorie B « sans qu’une proportion de postes ouverts à la promotion soit préalablement déterminée ». Cette possibilité est ouverte jusqu’au 31 décembre 2027.
En outre, « les statuts particuliers des cadres d’emplois de la catégorie B peuvent prévoir l’établissement d’une liste d’aptitude ouverte aux fonctionnaires de catégorie C relevant des grades d’avancement de leur cadre d’emplois respectif et ayant validé un examen professionnel sanctionnant une formation qualifiante aux fins d’exercer les fonctions de secrétaire général de mairie ».
La loi dispose également que les agents exerçant la fonction de SGM « bénéficient d’un avantage spécifique d’ancienneté pour le calcul de l’ancienneté requise au titre de l’avancement d’échelon ».
Promotion interne
Ces différentes dispositions nécessitaient la parution de plusieurs décrets pour devenir effectives. C’est désormais chose faite, avec la publication ce matin de quatre textes, qui vont apporter des changements majeurs pour les secrétaires de mairie.
Le premier est relatif « au recrutement, à la formation et à la promotion interne des secrétaires généraux de mairie ». Il établit d’abord que les fonctionnaires « titulaires des grades d’adjoint administratif territorial principal de 2e classe et de 1re classe du cadre d’emplois des adjoints administratifs territoriaux », dès lors qu’ils ont exercé pendant au moins quatre ans les fonctions de secrétaire de mairie dans une commune de moins de 2 000 habitants, peuvent être inscrits sur la liste d’aptitude pour être promus.
Cette disposition est conforme à la loi, mais elle pose un problème que l’AMF avait relevé dès le débat parlementaire et qui a suscité le rejet de ce décret par les organisations syndicales : les adjoints administratifs relevant du premier grade (échelle de rémunération C1) ne sont pas concernés par cette possibilité. Comme l’a écrit la Fédération des services publics de la CGT, « des milliers de secrétaires de mairie de catégorie C seront écartés du dispositif » qui, toujours selon la CGT, ne va concerner « qu’un tiers ou un quart » des secrétaires de mairie. Pour régler ce problème, il faudrait faire évoluer la loi du 30 décembre 2023. L’AMF n’a pas renoncé à cet objectif et continuera de se mobiliser.
Les fonctionnaires de catégorie C comptant au moins huit ans de service effectif peuvent également être inscrits sur une liste d’aptitude spécifique, prévue à l’article 3 de la loi, dès lors qu’ils ont validé « un examen professionnel sanctionnant une formation qualifiante aux fins d’exercer les fonctions de secrétaire général de mairie ».
Ce décret fixe l’obligation, pour les agents affectés sur un premier emploi de secrétaire général de mairie, de suivre dans l’année qui suit « une formation à ces fonctions (…) d’une durée de 15 jours ».
Enfin, le décret précise que « lorsqu’ils relèvent des grades d’avancement, les adjoints administratifs territoriaux nommés avant le 1er janvier 2028 peuvent être chargés du secrétariat de mairie dans une commune de moins de 2 000 habitants ». Les syndicats ont également dénoncé cette disposition, arguant qu’à partir du 1er janvier 2028, seuls les agents de catégorie B pourront être nommés SGM, les agents de catégorie C étant laissés « sur le bord du chemin ». Néanmoins, fait valoir l’AMF, trois ans et demi nous séparent de l’échéance de 2028, période pendant laquelle beaucoup de choses sont possibles.
Bonus d’ancienneté
Le deuxième décret traite du « bonus » d’ancienneté accordé aux SGM, défini par le gouvernement comme un « accélérateur de carrière ». Cette bonification s’applique « aux attachés territoriaux, aux rédacteurs territoriaux, aux adjoints administratifs territoriaux relevant des grades d’avancement, (…) qui exercent les fonctions de secrétaire général de mairie ». Tous les 8 ans de service dans ces fonctions, ces agents bénéficient désormais « d’une bonification d’ancienneté de 6 mois », de droit. De plus, les maires peuvent décider d’octroyer une bonification supplémentaire de « un à trois mois mois par période d’au moins trois années de service », en fonction de « la valeur professionnelle des agents ».
Cette disposition est en partie rétroactive : en effet, « les années de service (…) effectuées avant l’entrée en vigueur (de ce) décret ouvrent droit à la bonification d’ancienneté », dans la limite de 8 ans pour la bonification de droit et 3 ans pour la bonification au mérite.
Examen professionnel et formation qualifiante
Le troisième décret fixe les modalités d’organisation de l’examen professionnel permettant la promotion en catégorie B des agents de catégorie C souhaitant exercer la fonction de secrétaire général de mairie, dans le cadre du dispositif de « promotion-formation » prévu à l’article 3 de la loi. « Cette mesure permet aux agents territoriaux de catégorie C souhaitant exercer les fonctions de secrétaire général de mairie d’être promus en catégorie B après avoir suivi une formation qualifiante sanctionnée par un examen professionnel et sans qu’une proportion de postes ouverts à la promotion soit préalablement déterminée », rappelle la notice du décret.
Cet examen sera constitué d’une épreuve orale d’une durée de 25 minutes : elle commencera par « un exposé du candidat sur les acquis de son expérience professionnelle » (5 minutes), puis sera suivie d’un entretien de 20 minutes où le candidat se verra poser des questions « permettant d’apprécier les facultés d’analyse et de réflexion du candidat ainsi que son aptitude et sa motivation à exercer les missions de secrétaire général de mairie ».
Le jury, constitué par le centre de gestion, comprend au moins deux fonctionnaires territoriaux, deux personnalités qualifiées et deux élus locaux.
Une fois admis à cet examen, le fonctionnaire « ne peut être recruté que pour exercer uniquement les fonctions de secrétaire général de mairie » et aura « l’obligation d’exercer ces fonctions pour une durée minimale de trois ans ».
Enfin, le dernier texte décrit le contenu de la « formation qualifiante » qui précède cet examen. Elle sera d’une durée de 56 jours, répartis « sur une période d’au plus deux ans à compter de l’entrée en formation », et délivrée par le CNFPT. Elle s’articulera autour de quatre thèmes : assister et conseiller les élus, assurer les services à la population, gérer les services de la commune et organiser son travail.
Murielle Fabre, au nom de l’AMF, se dit ce matin « très heureuse » de la parution de ces textes, « fruits d’un très gros travail de concertation entre l’État, les employeurs territoriaux et les organisations syndicales ». Elle exprime toutefois « deux regrets », non pas sur les décrets mais sur la loi elle-même : comme les organisations syndicales, elle déplore qu’il n’ait pas été trouvé une solution « complète, pour tous les agents », les agents du premier grade étant laissés « au bord du chemin ». Par ailleurs, la maire de Lampertheim avait plaidé, avec l’AMF, pour une revalorisation financière globale du métier de secrétaire de mairie, avec la prise en compte d’une « grille indiciaire spécifique ». Une solution qui n’a pas été retenue par le législateur, au profit de « l’accélérateur de carrière » sous forme de bonus d’ancienneté. L’AMF se réjouit donc des avancées importantes permises par ces textes, mais estime que le combat n’est pas terminé.
SOURCE : MAIREinfo -Édition du mercredi 17 juillet 2024