Cette instruction d’une quinzaine de pages, que Maire info a pu consulter, a pour objet « l’accès à l’hébergement et au logement des personnes déplacées d’Ukraine bénéficiaires de la protection temporaire ». Rappelons que cette « protection temporaire » est un mécanisme mis en place sur décision de l’Union européenne, le 4 mars dernier, qui permet d’accorder un certain nombre de droits aux réfugiés de façon automatique, sans examen individuel du dossier par l’Ofpra. Les détails de ce dispositif, pour la France, sont exposés dans une instruction du 10 mars. Il y est notamment rappelé que les personnes bénéficiant de la protection temporaire « n’ont pas vocation à être hébergées au sein du dispositif national d’accueil pour demandeurs d’asile ». D’autres solutions d’accueil doivent être mobilisées, qui s’appuient entre autres sur les offres des particuliers, des collectivités locales et des associations.
Urgence
L’instruction consacrée au logement place les préfets au centre du dispositif : il leur revient de « structurer les initiatives » de ces différents acteurs et « de les compléter par des dispositifs d’accueil et d’accompagnement sous le pilotage direct de l’État ».
La première étape consiste à organiser des « hébergements d’urgence » à proximité des lieux d’arrivée des réfugiés (aéroports, gares, frontières est du pays). Ces hébergements « sas » (une ou deux nuits), « auront vocation à orienter les personnes en fonction de leur situation personnelle ».
Deuxième étage de la fusée : les « lieux d’hébergement collectifs », dans l’attente d’un accès au logement, dits « hébergement d’urgence ad hoc ». Il est fait clairement appel aux collectivités locales, et « tous les élus du territoire » doivent être « mobilisés pour y contribuer ». Les lieux mobilisés auront vocation à accueillir des personnes « pendant plusieurs mois ».
Accès au logement
Troisième étape : il faudra offrir aux réfugiés une solution de logement pérenne. Il est demandé aux préfets de s’appuyer à la fois sur les « partenaires habituels » (bailleurs sociaux, collectivités, agences immobilières…) et sur les propositions d’hébergement venues des citoyens, notamment via le site parrainage.refugies.info.
Les logements « entiers et autonomes » doivent être privilégiés, de même que la mise à disposition « à titre gratuit ou moyennant une contrepartie financière symbolique », en passant par l’intermédiation d’une association. Dans le cas d’un logement mis à disposition à titre gratuit, le propriétaire et l’association signent un contrat de prêt (ce que l’on appelle un commodat, ou prêt à usage), « puis l’association hébergera le ménage ». Lorsqu’un loyer sera demandé, il est demandé de passer par le système de l’intermédiation locative : le propriétaire loue le logement à une association qui le sous-loue à la personne.
L’hébergement chez des citoyens n’est clairement pas la solution privilégiée par le gouvernement : « Ces solutions emportent des problématiques, inhérentes à une cohabitation, et des risques, compte tenu de la vulnérabilité des ménages ». Elles ne doivent donc être mobilisées qu’en dernier recours, avec « un suivi particulier » : « Il est en particulier essentiel que les familles accueillantes puissent être sélectionnées par l’opérateur qui devra s’assurer de leur motivation ainsi que des conditions dans lesquelles la famille sera accueillie ». Si chacun est d’accord pour une cohabitation, « une convention tripartite » devra être signée entre la famille accueillante, les personnes accueillies et une association agréée.
L’État veut « éviter au maximum » de prendre en charge les loyers
Il est demandé en outre aux préfets d’accorder « un soin tout particulier » à la mise en place de l’accompagnement des personnes une fois installées, en s’appuyant sur des associations. Celles-ci devront « assurer l’accompagnement des personnes tant sur le plan administratif (…) que social (scolarité, insertion, orientation vers l’emploi…) ».
Reste la question du financement. L’instruction est assez claire sur le sujet : « Il convient d’éviter au maximum la prise en charge du loyer par l’État »… sur une sujet qui est pourtant de sa compétence. Si un loyer est exigé, il doit autant que faire se peut « être établi au niveau de l’aide au logement perçue par le ménage ». Si un différentiel existe, il doit être financée, expliquent les auteurs du texte, « par une couverture partielle ou totale par une collectivité », ou encore une contribution du ménage lui-même, un « abandon partiel du loyer par le bailleur », etc. C’est seulement « à titre exceptionnel » que l’État pourra contribuer « à hauteur de 200 euros maximum par logement et par mois ».
Il est en outre clairement indiqué que « les logements mis à la disposition des ménages ukrainiens par une collectivité sont à la charge de cette dernière y compris pour l’accompagnement des ménages, par exemple via leur CCAS ». Certains CCAS commencent d’ailleurs à pointer le montant de ces dépenses qui peuvent aller jusqu’à la souscription et le paiement des contrats de fluides et d’assurance habitation.
Pour ce qui relève du logement social, l’État souhaite éviter « tout effet d’éviction pour les personnes mal logées reconnues prioritaires par l’État en attende d’un logement social ». Il est donc « fortement souhaité » que les logements proposés aux réfugiés « relèvent du contingent des collectivités ou du patrimoine propre du bailleur social ou d’Action Logement ». Il est demandé aux préfets de réunir rapidement « les bailleurs sociaux et les collectivités » de leur département « afin d’identifier les volumes pouvant être mobilisés ».
SOURCE : MAIREinfo – Édition du lundi 28 mars 2022