L’article 19 de la LOM (loi d’orientation des mobilités du 24 décembre 2019) est consacré aux mesures favorisant la mobilité des personnes en situation de handicap. Cet article a notamment rendu ces mesures obligatoires, alors qu’elles n’étaient que facultatives jusque-là.
Le III de cet article 19 aborde la question des places de stationnement équipées de ce que l’on désigne maintenant par le sigle IRVE (infrastructures de recharge de véhicule électrique). Il est indiqué que sur la voirie communale, « lorsque des places de stationnement sont matérialisées sur le domaine public et équipées de dispositifs de recharge pour véhicules électriques », il est obligatoire de rendre accessible un pourcentage de ces places aux personnes à mobilité réduite, « sans que cette ou ces places leur soient réservées ».
Cette disposition est obligatoire pour toutes les places créées à compter de la date de publication de la loi, c’est-à-dire après le 26 décembre 2019. Le problème étant que le pourcentage de places accessibles devait être fixé par arrêté, et que celui-ci n’est sorti que ce matin.
Rétroactivité
Le gouvernement, bien qu’avec beaucoup de retard, a consulté l’AMF en avril, au moment de rédiger l’arrêté. Celle-ci avait notamment demandé que ces dispositions ne soient pas rétroactives, c’est-à-dire que les communes ne soient pas obligées, à la date de parution de l’arrêté, de « traiter » toutes les places créées depuis presque quatre ans. Impossible, a répondu le ministère de l’Intérieur, puisque le principe de rétroactivité est précisément inscrit dans la loi, il n’est pas envisageable de le modifier par la voie réglementaire. À défaut, l’AMF a au moins demandé que l’arrêté permette un certain nombre de dérogations.
Les services du ministère ont retravaillé le projet d’arrêté jusqu’à le rendre « soutenable » pour les collectivités, ce qui correspondait à la demande de l’AMF, inquiète que des normes trop restrictives découragent les élus d’installer des IRVE. Entre le projet initial et la version finale, les taux de places à rendre accessibles ont été diminués et affinés, et un certain nombre de souplesses ont été données aux communes et EPCI concernés.
Les nouvelles normes
L’objectif principal de cet arrêté était, rappelons-le, de fixer le pourcentage de places devant être accessibles. Ce pourcentage varie selon le nombre de places équipées d’IRVE dans la commune ou l’EPCI. Pour rendre la rétroactivité plus soutenable, le gouvernement a choisi de fixer deux séries de taux : l’une applicable entre la parution de la LOM et le 31 décembre 2025 ; l’autre à partir du 1er janvier 2026.
La première série est donc applicable immédiatement : jusqu’à 5 places de stationnement équipées d’IRVE, la commune ou l’EPCI doit rendre au moins une place accessible. De 6 à 20 places, 30 % doivent être accessibles ; de 21 à 50 places, 25 % ; de 51 à 100 places, 20 % ; de 101 à 199 places, 15 %. À partir de 200 places, la collectivité devra rendre accessibles 10 % des places.
Par ailleurs, il est fixé un nombre minimal de places agrandies (de 7 à 9 mètres), permettant la recharge de véhicules équipés d’un haillon arrière. Ce nombre varie de 1 à 8 selon le nombre total de places équipées. Au-delà de 200 places équipées, il doit être de 2 places accessibles et allongées pour 50 places équipées.
Concernant les prescriptions techniques de ces places accessibles, elles doivent répondre aux normes fixées par le décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006.
Ne pas avoir à choisir
Il reste à résoudre la question financière, totalement absente comme souvent des réflexions du gouvernement, puisque le ministère prescripteur n’a pas fait d’évaluation financière de la réforme. La mise en accessibilité des places de stationnement a un coût important, et les communes et EPCI qui ont mis en place de nombreuses places équipées d’IRVE, depuis 2020, vont devoir faire face à une addition qui pourrait, selon l’Association des ingénieurs territoriaux de France, s’élever à plusieurs milliers d’euros par place. L’équation n’est pas simple : si la facture se révèle trop lourde pour certaines collectivités, elles n’auront, vu les termes de la loi, pas d’autre choix que de supprimer des infrastructures de recharge des véhicules électriques pour rester dans les clous. Ce qui serait d’autant plus problèmatique que c’est bien l’État qui a tardé à publier son arrêté, mettant les élus dans l’obligation de faire des travaux a posteriori, ce qui est toujours plus coûteux.
Aucun élu n’ayant envie de choisir entre écologie et accessibilité, il est donc à souhaiter que ces aménagements puissent bénéficier d’aides financières de l’État.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du mardi 31 octobre 2023