« Détresse alimentaire »
La tribune est signée de 39 maires de communes abritant des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), de toutes tailles – on trouve parmi les signataires la maire de Paris mais aussi ceux de Saint-Martin-d’Hères (Isère) ou de Lormont (Gironde). Il s’agit essentiellement de maires de gauche (PS, PCF ou EELV), mais pas seulement, deux maires « divers droite » ayant signé la tribune. Font également partie des signataires plusieurs membres des instances dirigeantes de l’AMF, dont André Laignel (Issoudun), son premier vice-président délégué, Mohamed Gnabaly (L’Île-Saint-Denis), et Gilles Leproust (Allones), membres du Bureau de l’association, ou Hélène Geoffroy (Vaulx-en-Velin), co-présidente de sa commission Politique de la ville.
Pour ces maires, c’est l’inflation qui est aujourd’hui le problème le plus criant des banlieues populaires, avec une situation de « détresse alimentaire » qui touche de plus en plus de foyers : «Des habitants sont contraints de ne pas manger à tous les repas, et le nombre de personnes qui font appel aux distributions d’urgence alimentaire ne fait qu’augmenter. »
La deuxième alerte concerne les difficultés de paiement des loyers : « En 2022, la moitié des organismes HLM a enregistré une augmentation de plus de 10 % du nombre de loyers en retard de paiement de plus de trois mois », écrivent les maires, qui savent déjà que cette situation « va indéniablement s’aggraver en 2023 ». Ils rappellent également que le taux de chômage dans les QPV est « 2,7 fois supérieur » à celui des autres quartiers.
La crise climatique, poursuivent les élus, frappe plus durement les habitants des quartiers pauvres que les autres – les canicules y étant « plus éprouvantes ». « L’affaiblissement des services publics » conduit à une augmentation « préoccupante » du nombre de personnes « qui ne recourent plus à leurs droits » , et la dématérialisation des procédures ne résout rien, du fait de la fracture numérique.
Plan d’urgence
Dans ces quartiers, « les associations sont à bout de souffle » et les collectivités « sont dans l’incapacité de lancer les travaux et doivent revoir à la baisse les projets », notamment du fait de la hausse des coûts, « ce qui amplifie le doute des habitants dans la parole publique ». Ces habitants ont de plus en plus « le sentiment d’être abandonnés par la République ».
Les maires demandent donc au gouvernement « un plan d’urgence », appuyé sur trois mesures : « un dispositif pérenne de lutte contre la précarité alimentaire », le gel des prix de l’énergie pour les bailleurs sociaux, et un abondement de « deux milliards d’euros » pour l’Anru (Agence nationale de la rénovation urbaine). Ils demandent que les « droits élémentaires » (éducation, santé, culture, sport, sécurité, emploi), soient « une réalité pour tous », et que « le droit commun soit rétabli dans les quartiers populaires ».
Les maires signataires se disent « disponibles pour contribuer à élaborer des réponses pertinentes », et en appellent « à la responsabilité du président de la République » : « Ignorer ce nouvel appel au secours reviendrait à mépriser la situation de millions d’habitants. »
Reste à attendre le discours que le chef de l’État doit prononcer sur les nouveaux contrats de ville, baptisés « Engagements quartiers 2030 », comme l’a dévoilé en avril le ministre du Logement, Olivier Klein, pour savoir si l’exécutif entend répondre à cet « appel au secours » à hauteur des attentes des maires et de la population.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du mercredi 24 mai 2023