C’est, de façon inhabituelle, dans Paris Match que la ministre chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, a dévoilé ses chiffres, avant que ceux-ci soient précisés par son entourage.
Alors que l’AMF estimait récemment que les atteintes contre les élus avaient augmenté de 22 % en 2022, le chiffre avancé par la ministre est encore plus préoccupant : il serait de + 32 %. Les faits recensés en 2022 sont au nombre de 2 265, contre 1 720 un an plus tôt. La différence s’explique en partie par le fait que l’AMF ne recense que les atteintes contre les élus locaux, alors que le gouvernement inclut les parlementaires. Mais surtout parce que l’AMF n’est prévenue, par les élus, que des faits les plus graves, alors que le ministère de l’Intérieur inclut la totalité des faits dans son recensement.
Toutes les « atteintes » recensées
Le gouvernement explique en effet que les services du ministère de l’Intérieur ne s’appuient pas seulement sur les plaintes déposées, car cela aurait pour effet de « sous-évaluer la situation », dans la mesure où un certain nombre de faits ne sont pas assortis d’un dépôt de plainte.
Le ministère a recensé tous types de faits : atteintes physiques, prises à partie et agressions verbales contre les élus eux-mêmes ; atteintes contre les locaux publics et privés (permanences, mairies, domicile personnel…), pouvant aller du tag à l’incendie ; et enfin les « menaces, injures et outrages écrits ou verbaux », y compris sur les réseaux sociaux.
C’est en additionnant ces faits que le gouvernement obtient le chiffre de 2 235, dont « 7 sur 10 sont des menaces, injures ou outrages ». Les faits de violence physique restent « largement minoritaires» (160 cas en 2022) et stables par rapport à l’année précédente, mais « dans plus de la moitié des cas, ils concernent les maires et leurs adjoints, très souvent lorsqu’ils cherchent à assurer la sécurité publique ».
Sur l’année 2022, note le ministère, les faits ont été plus nombreux lors du premier semestre, dans le double contexte de la contestation contre le pass sanitaire et des campagnes présidentielle et législatives. « Les atteintes n’ont pas d’étiquette, note enfin le ministère, et touchent les élus de tout bord. L’élu n’est pas agressé pour ce qu’il pense (…) mais pour ce qu’il est. »
Renforcement des sanctions
Quelle réponse le gouvernement va-t-il donner à cette montée en puissance des agressions contre les élus ? Dominique Faure donne de premiers éléments de réponse dans son interview à Paris Match.
Le premier axe est de « renforcer les sanctions », déclare la ministre, qui se dit « en colère » face à cette situation et qui y voit « le signe d’une démocratie qui recule ». Si les textes législatifs ont déjà évolué récemment, la ministre souhaite aller plus loin : « Je vais travailler en lien étroit avec le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti pour que nous réfléchissions à aligner les peines encourues pour les violences contre élus sur celles des personnels en uniforme. » C’est un changement de pied de la part du gouvernement, qui s ‘était opposé à cette mesure lorsqu’elle avait été proposée lors de l’examen du projet de loi d’orientation du ministère de l’Intérieur (Lopmi), en 2022. La ministre annonce que cette évolution se fera par une loi, « avant l’été ».
Par ailleurs, le ministère de l’Intérieur va « créer, dans les prochains jours, une cellule d’analyse et de lutte spécifiquement dédiée à la lutte contre les atteintes aux élus ». Cette cellule « sera chargée de recenser ces phénomènes, d’analyser chaque fait, pour les prévenir et y répondre en complète coordination avec les préfectures, la police, la gendarmerie et les parquets ».
On n’en sait pas plus, à cette heure, sur les modalités de fonctionnement de cette future « cellule », et en particulier de son articulation avec les associations d’élus.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du jeudi 16 mars 2023