C’était le 25 octobre dernier. Auditionné par la commission de la culture du Sénat, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, créait la stupéfaction en annonçant « le report ou l’annulation de tous les événements en France qui demandent des unités de force mobile ou qui demandent la présence très forte de nombre de policiers » pendant les Jeux olympique et paralympiques de 2024. Sans compter, en passant, cette petite bombe lâchée par le ministre : « Il n’y aura plus de CRS sur les plages cette année-là ». Cette phrase avait stupéfait l’AMF, qui, par communiqué, avait dénoncé « une annonce (qui) menace le maintien de l’ordre public, le dispositif de surveillance et de sauvetage des baigneurs et la protection de l’environnement sur les plages ». L’association ajoutait que « la sécurité est une compétence régalienne et (que) les maires n’ont pas les moyens de pallier l’absence de CRS et autres forces mobiles ».
« Solution équilibrée »
Depuis, les concertations qui n’ont pas eu lieu avant cette annonce vont bon train. Plusieurs ministres se sont exprimés pour tempérer les propos de Gérald Darmanin, promettre que rien ne se ferait sans discussion avec les maires et les organisateurs en matière de tenue des grands événements. Au Congrès de l’AMF, encore, le président de l’association, David Lisnard, a instamment demandé à la Première ministre de ne pas laisser annuler les festivals à l’été 2024. Celle-ci avait promis qu’une « solution équilibrée » serait trouvée, et qu’il était « possible de concilier ces deux impératifs » que sont le maintien de l’ordre pendant les JO et la tenue des grands événements.
Événements d’ampleur « pas envisageables » lors des JOP
La circulaire diffusée hier, que Maire info a pu consulter, n’est pas vraiment de nature à rassurer élus et organisateurs, puisqu’elle confirme que pendant les moments les plus intenses de l’été 2024, « aucun événement culturel, festif et/ou sportif d’ampleur » ne pourra être envisagé.
Certes, les trois ministres signataires de cette circulaire (Intérieur, Culture et Sports) reconnaissent « l’importance des festivals et des manifestations sportives qui font la vitalité des territoires pendant l’été » et demandent à ce qu’ils soient « pris en considération ». Mais pour tous les événements qui demandent un renfort en « unités de forces mobiles » (gendarmes mobiles et CRS), les perspectives ne sont pas très réjouissantes.
Comme cela avait déjà été dit par la ministre de la Culture, l’été sera divisé en quatre phases.
La première va du 23 juin au 17 juillet 2024, c’est-à-dire en amont des JO. Pendant cette phase, les événements demandant des renforts de forces mobiles « pourront être maintenus ». Mais les préfets doivent dès maintenant « conduire un dialogue avec les organisateurs » pour tenter de « contenir les moyens nécessaires à leur sécurisation ». Il est conseillé par les ministres de prévoir à ces dates la tenue d’événements initialement prévus plus tard – ce sera le cas, par exemple, du Festival des Vieilles charrues, qui sera avancé. Concernant les évènements de moindre importance, ceux-ci ne feront pas l’objet de restrictions particulières.
Pendant les olympiades elles-mêmes, soit du 18 juillet au 11 août (Jeux olympiques) et du 24 août au 8 septembre (Jeux paralympiques), la porte se referme : « Aucun événement d’ampleur ne sera envisageable », dès lors qu’il mobilise des renforts de forces mobiles. Une exception sera faite pour les quelques jours du début de la période, pendant lesquels pourront se terminer des événements débutés plus tôt (notamment le Tour de France et le festival d’Avignon). Mais c’est tout.
Quant aux événements « de moindre ampleur », c’est-à-dire ceux qui peuvent se dérouler avec le seul recours aux forces de sécurité « locales », « ils ont vocation à se maintenir », « en dialogue avec les collectivités territoriales ».
Il n’y aura donc, en effet, aucun « grand événements » au cœur de l’été et pendant la dernière semaine d’août et la première de septembre.
Reste, enfin, la dizaine de jours séparant les Jeux olympiques et les Jeux paralypiques, du 12 au 23 août. Grosso modo, la règle est la même : pas de renforts d’unités mobiles – ne serait-ce que pour laisser à celles-ci « un minimum de récupération », et possibilité, seulement, d’organiser des événements avec les forces locales. La différence avec les autres périodes étant que « des exceptions décidées dans un cadre national » seront possibles. C’est déjà le cas, annonce le gouvernement, pour les Interceltiques de Lorient et le festival d’Aurillac. Des échanges « cas par cas » seront conduits pour d’autres événements, comme le festival Rock en Seine.
Au-delà des festivals, les férias (fêtes de Bayonne, Dax, Béziers, etc.) semblent donc fortement compromises, du moins aux dates habituelles.
Les annonces de l’Etat concernant l’impact des JOP sur la tenue des festivals durant l’été 2024 ont fait réagir les professionnels ainsi que plusieurs associations d’élus, dont l’AMF, qui demandent de concert des garanties pour le maintien de ces évènements.
Pas de « renfort de CRS » sur les plages
Le gouvernement demande aux préfets de mener des discussions dès maintenant avec les élus et les organisateurs pour faire rentrer les événements dans ce calendrier, en sachant que les contrats doivent être signés dès maintenant. Il annonce que des mesures exceptionnelles vont être prises en matière d’organisation des forces de sécurité pendant cette période, notamment « la suspension temporaire des zones de compétence police et gendarmerie, pour que policiers et gendarmes puissent être indifféremment mobilisés ». Les « autres acteurs », dont la sécurité privée, seront également sollicités.
Reste la question des plages. La circulaire y fait allusion, et semble aller dans le sens des propos de Gérald Darmanin : « À titre exceptionnel », l’État procédera à « la mobilisation de toutes les unités de forces mobiles disponibles, ce qui signifie, par exemple, l’absence de renfort CRS dans les villes côtières ». Il semble donc acté que les maires ne pourront pas faire appel en 2024 aux CRS pour surveiller les plages.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du mercredi 14 décembre 2022