En juillet dernier, dans une démarche comparable au Ségur de la santé ou au Beauvau de la sécurité, le ministère de l’Économie a lancé les Assises du bâtiment et des travaux publics. Il s’agissait de répondre à une triple préoccupation : trouver des solutions pour faire face à l’explosion des prix des matériaux et de l’énergie ; surmonter les difficultés d’approvisionnement (liées à la pénurie de semi-conducteurs, au blocage de certains ports chinois pendant des mois pour cause de covid-19, à la guerre en Ukraine…), et enfin « accompagner le secteur dans sa transition écologique ».
Ces Assises, qui se sont déroulées « dans le cadre de groupes de travail associant toutes les parties prenantes », ont permis de dégager « une centaine de mesures » qu’il reste maintenant à affiner.
Avances de trésorerie
Mais déjà, 13 premières mesures ont été actées et, assure Bercy, validées par les collectivités territoriales. Elles vont donc entrer en vigueur « sans délai » – bien que l’on suppose tout de même que leur entrée en vigueur doive faire l’objet de textes réglementaires.
Un premier train de mesures vise à « améliorer la trésorerie des entreprises », par exemple en « relevant le seuil plancher des avances dans tous les marchés publics ». Ces seuils vont passer, « dans les plus brefs délais », de 20 à 30 % pour l’ensemble des marchés publics passés avec des PME. Par ailleurs, les textes vont être « réécrits » pour permettre « l’amélioration de l’échelonnement du remboursement de ces avances ». Bercy va publier « un guide de bonnes pratiques en matière de pénalités de retard payées par les acteurs du BTP », pour éviter que « les situations de pénurie actuelle leur soient injustement reprochées ».
Marchés publics : relèvement du seuil de gré à gré
Le deuxième train de mesure est celui qui a été évoqué hier dans Maire info, sur la question de « l’imprévision ». Bercy rappelle que le gouvernement « saisi le Conseil d’État, qui vient d’indiquer qu’il était possible de réviser les prix dans les marchés publics en cours, pour prendre en compte les surcoûts engendrés par les circonstances exceptionnelles ». Une circulaire est annoncée « dans les tous prochains jours », en plus de la fiche pratique publiée hier par le ministère.
Mais l’une des mesures les plus importantes pour les collectivités est ailleurs : le gouvernement va « pérenniser » le relèvement à 100 000 euros du seuil pour les marchés publics de travaux en dessous duquel ces marchés peuvent être conclus sans publicité formelle et avec une procédure de mise en concurrence très allégée.
Rappelons que ce seuil est longtemps resté à 25 000 euros, avant d’être relevé une première fois, le 1er janvier 2020, à 40 000 euros. Puis, du fait de l’épidémie de covid-19 et des graves difficultés qu’elle a engendrées pour le secteur du BTP, le seuil a été relevé provisoirement à 100 000 euros, pour la période allant du 8 décembre 2020 au 31 décembre 2022.
Ce seuil va donc devenir définitif.
Parmi les autres mesures que les élus doivent retenir de ce plan, notons « l’abaissement de 6 à 4 mois du délai inscrit dans le cahier des clauses administratives générales des marchés publics, entre la notification d’un marché et l’ordre de service de démarrage effectif des travaux, afin d’éviter une inflation des coûts durant cette période » .
Le communiqué de presse de Bercy se termine par une petite allusion aux collectivités aux accents de leçon de morale. Les ministres disent « encourager vivement les collectivités territoriales à se saisir de cet outil de concertation » (les Assises, qui vont se poursuivre dans les prochains mois), et surtout à « s’engager en faveur de mesures cohérentes avec les dispositions prises par l’État ». Certes, répondront sans doute beaucoup d’élus, mais le gouvernement, de son côté, ne s’est apparemment toujours pas posé la question de la manière dont les collectivités, déjà confrontées à des problèmes de trésorerie considérables du fait de l’inflation, vont pouvoir financer les surcoûts générés par ces mesures.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du vendredi 23 septembre 2022