Les France services, annoncées par Emmanuel Macron dès avril 2019, se sont rapidement déployées dans les territoires. En avril 2022, 2 197 maisons France service ont été labéllisées, dépassant donc l’objectif fixé par le gouvernement (2 000 en 2022). La mise en place de bus en complément des structures fixes a aussi été une réussite puisque 106 bus France services sont aujourd’hui déployés.
Pour rappel, les France services résultent « en partie du dispositif des 1 300 maisons de services au public (MSAP), lui-même né de la structuration au niveau national d’initiatives locales antérieures, comme l’explique Bernard Delcros, rapporteur spécial des crédits de la politique des territoires au Sénat. Il s’agit d’un réseau de services publics mutualisés devant permettre aux usagers d’effectuer différentes démarches administratives dans un lieu unique. »
Le rapporteur spécial des crédits de la mission « cohésion des territoires » de la commission des Finances du Sénat a présenté le 13 juillet les résultats de son contrôle budgétaire sur les France services avec la publication d’un rapport qui s’est notamment construit sur des retours de terrain via une consultation auprès de 500 élus locaux.
Ce bilan insiste sur l’importance « d’éviter l’essoufflement de la dynamique France services » et Bernard Delcros formule pour cela 27 recommandations.
L’AMF a été auditionnée dans le cadre de cette enquête. Constance de Pélichy, maire de La Ferté-Saint-Aubin (45) et co-présidente de la commission Aménagement, urbanisme, habitat, logement, représentait l’association et avait insisté sur la pérennisation des aides indispensables au maintien des structures et sur le besoin de créer du lien entre France services et la mairie. Elle avait également rappelé la nécessaire coordination entre les mairies et les structures France Services quand elles sont portées par les associations ou par La Poste afin de parfaire l’orientation du public. L’AMF avait aussi inidqué que l’implication des opérateurs doit être réelle pour garantir la qualité du dispositif qui ne doit pas reposer seulement sur les agents « France services ».
Un maillage actuel insuffisant en milieu rural
Même si le rapporteur salue dans son rapport « la mise en place de bus en complément des structures fixes » c’est-à-dire les 106 bus France services aujourd’hui déployés, il pointe néanmoins « un maillage territorial à parfaire ».
« Le réseau France services doit coller davantage à la proximité et à la réalité du quotidien des usagers » , peut-on lire dans le rapport. En milieu rural, un France services « dans chaque bourg centre » serait indispensable, selon le rapporteur.
64 % des France services sont portées par les collectivités territoriales, 18 % par La Poste, 15 % par un réseau associatif et « le reste est partagé entre l’État (1 % des France services sont localisées dans des sous-préfectures) et la mutualité sociale agricole (MSA). Le nombre de maisons et leur fréquentation connaissent également d’importantes variations selon les départements. »
Des améliorations en termes de qualité
Pour aller « vers des maisons France services nouvelle génération » , la formation et la valorisation professionnelle des agents est indispensable. « Aujourd’hui l’enjeu est de stabiliser les équipes d’accueil, de mieux les former et de mieux reconnaître ces métiers devenus essentiels » , peut-on lire dans le rapport. Les conseillers numériques doivent aussi être pérennisés car ils jouent un rôle « essentiel en faveur de l’inclusion numérique. »
Le sénateur insiste aussi sur le besoin de « consolider le cadre existant » notamment avec le développement de nouveaux services en partenariat avec les neuf opérateurs déjà présents et avec de nouveaux opérateurs comme par exemple le réseau France Rénov’, « pour lequel le besoin d’accompagnement est très grand. »
Enfin, comme de nombreux acteurs sont impliqués dans le programme France services, « l’ANCT doit formaliser un cadre départemental d’animation en s’inspirant des bonnes pratiques dans certains départements » et en développant « un lien étroit avec les communes, notamment en maintenant un contact continu avec les secrétaires de mairie, qui constituent historiquement le premier relais de services publics de proximité. »
Une participation financière de l’État jugée « insuffisante »
De nombreux paramètres sont à réviser sur le plan financier notamment du côté de la participation de l’État et du mode de calcul des contributions. Il est rappelé qu’actuellement, « chaque France services est financée par un forfait de 30 000 euros par an et par maison. Ce financement s’appuie sur le fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT) et sur le fonds national France services (FNFS). »
Problème : le coût de fonctionnement annuel moyen d’une maison France services est d’environ 110 000 euros et 150 000 euros pour les France services postales. « Le reste à charge moyen pour les porteurs de projet, une fois décompté le forfait de 30 000 euros, est donc de 80 000 euros par an et par maison. En d’autres termes, le forfait finance actuellement à peine plus du quart du coût de fonctionnement réel d’une maison France services. Il n’a pas évolué depuis les MSAP, alors même que le coût de fonctionnement des maisons est nettement supérieur en raison d’un cahier des charges beaucoup plus exigeant. »
Cette politique France services est donc essentiellement à la charge des collectivités territoriales, ce qui « n’est plus soutenable pour les porteurs de projet, notamment pour les collectivités rurales qui assurent parfois le fonctionnement et le financement de plusieurs maisons en raison de la faible densité de population et de l’étendue de leur territoire, alors même que leurs capacités financières sont souvent les plus faibles. »
Bernard Delcros appelle donc l’État à mieux accompagner les collectivités « pour atteindre l’ambition du programme France services » et propose concrètement que « la participation cumulée de l’État et des opérateurs nationaux devrait être portée à 50 % du coût minimum d’une maison France services, soit 50 000 euros par maison. »