Les enjeux économiques et environnementaux incitent les collectivités locales à développer des démarches économes dans la conception et la gestion de leurs voirie et espaces publics. Cette série de fiche met en avant des exemples de réalisations économes, en expliquant comment s’est déroulée l’ensemble de la démarche.
5 fiches sont publiées:
- Fiche n°01 – Le réemploi d’une voie ferrée en liaison douce : l’expérience de Caux-Austreberthe, Pays de Caux
- Fiche n°02 – Un parking-relais modulable en période estivale : l’exemple d’Arcachon
- Fiche n°03 – Reconversion d’un parking en parc urbain à Saint-Étienne
- Fiche n° 04 – Une solution innovante pour le retraitement en place d’une chaussée polluée
- Fiche n° 05 – La gestion économe des installations d’éclairage public -État de l’art et applications
LA GESTION ÉCONOME DES INSTALLATIONS D’ÉCLAIRAGE PUBLIC
Cette 5e fiche présente des solutions pour optimiser les dépenses d’éclairage public, qui représentent 32% de la consommation d’électricité des communes. L’éclairage public constitue un poste de dépense important de consommation d’électricité des communes (second poste de dépenses énergétiques après les bâtiments publics). La présente fiche a pour objet de présenter l’état de l’art des leviers d’actions possibles pour une gestion économe des installations d’éclairage public suivi de quelques exemples illustratifs particulièrement inspirants. Elle s’adresse particulièrement aux gestionnaires de parc d’éclairage (communes, intercommunalités, syndicats d’énergie, etc.).
Plusieurs enjeux concomitants pour un éclairage public qualitatif
Un éclairage public qualitatif se doit de veiller aux trois composantes complémentaires du développement durable à savoir les dimensions économique, sociale et environnementale.
Ainsi, une gestion économe de l’éclairage public ne se restreint pas aux seules questions d’optimisation énergétique et de dépenses budgétaires (bien qu’essentielles). Elle s’intéresse également aux enjeux de sécurité routière et de sûreté urbaine: la nuit, les installations d’éclairage public se doivent de participer à la visibilité de l’ensemble des usagers de la route et au sentiment de bien-être des riverains.
Dans le même temps, les préoccupations environnementales ont donné lieu à de nouvelles dispositions réglementaires. Ces dernières prescrivent une réduction des nuisances lumineuses aux profits de la biodiversité et de la qualité de ciel nocturne. Notons enfin que l’éclairage des espaces publics peut avoir des impacts sanitaires sur l’humain (intrusion de lumière chez l’habitant, retard d’endormissement, etc.).
Quels leviers d’actions pour une gestion économe des installations d’éclairage
La fiche présente les concepts généraux pour concevoir, piloter, entretenir et rénover une installation d’éclairage selon une approche économe.
Dans un premier temps, la fiche détaille les savoirs de base pour améliorer l’efficacité des installations du parc d’éclairage. Elle montre l’intérêt de certains outils de gestion dans l’optimisation de l’entretien et de la maintenance du parc d’éclairage.
Par la suite, la fiche précise les leviers d’action à disposition des gestionnaires de parc d’éclairage pour réduire les dépenses énergétiques.
Le premier levier d’action repose sur une diminution de la puissance des installations selon plusieurs approches détaillées dans la fiche:
- L’optimisation des niveaux lumineux par rapport aux besoins : Cette approche est illustrée par la démarche de réduction des dépenses énergétiques de l’éclairage public mise en œuvre par la ville de Saint-Malo (35). L’originalité de cette démarche a été d’accorder une grande considération au ressenti des usagers de l’espace public.
- Le changement de technologie : La fiche illustre ce principe par la rénovation de l’ensemble des luminaires d’éclairage public du lotissement des Bouroumettes mise en oeuvre par la commune des Pennes Mirabeau (13). La rénovation s’est notamment appuyée sur des études de relevés d’éclairements au sol de façon à garantir des niveaux d’éclairage suffisants sur trottoir et sur chaussée.
- L’optimisation du couple (éclairage/ revêtement) : Cette approche est illustrée par le procédé Lumiroute® qui, à l’issue de 3 années de tests (2014-2017) sur 4 sections d’un boulevard de la ville de Limoges (87), démontre son potentiel dans la réduction de la puissance d’éclairage à installer.
Le second levier d’action porte sur l’optimisation de la durée d’éclairage.
Suivant l’idée de limiter la durée d’éclairage aux seules périodes où l’éclairage se révèle nécessaire, la fiche détaille les solutions technologiques permettant de piloter l’allumage et l’extinction des points lumineux en fonction de luminosité fluctuant au fil des jours.
Certaines communes prennent aussi le parti d’une extinction localisée ou totale de leurs installations d’éclairage à certaines périodes de la nuit. Il est dans ce cas conseillé aux élus de bien cadrer la démarche et d’impliquer au mieux les usagers et les riverains.
Une voie verte réversible
La première fiche de cette série porte sur le réemploi d’une ancienne voie ferrée en liaison douce, par la communauté de communes Caux-Austreberthe en Seine-Maritime. Cette voie verte a été mise en service en 2014, dans le cadre de la mise en oeuvre de sa politique en faveur des modes actifs, elle est devenue le principal axe de déplacement doux du territoire.
Le réemploi d’une ancienne voie ferrée traversant le territoire communautaire, et qui dessert le centre des communes traversées, s’est révélé être une solution d’aménagement économe sur les plans à la fois économique et environnemental. En outre, la solution prend en compte les contraintes de réversibilité possible de la ligne ferroviaire.
Deux conditions ont été fixées pour l’aménagement de ces 6 km de liaison douce:
- Conserver les éléments existants du patrimoine, en particulier les vestiges d’une ancienne voie ferrée capable de pouvoir être remise en service, ce qui impliquait de conserver les rails en l’état.
- Respecter la démarche « zéro phyto » incitant à des pratiques de gestion vertueuses sur le plan environnemental.
En termes de dimensions, l’aménagement avait des caractéristiques différentes de celles qui sont préconisées pour créer une voie verte, soit au moins 3 m de largeur. La voie a donc été conçue pour à la fois conserver les rails, et permettre une circulation aisée des piétons et des vélos.
Le coût de total de l’opération s’élève à 275 000 € HT, soit un ratio d’environ 46 000 € HT par kilomètre, et 25.000 euros par an environ pour l’entretien et l’exploitation.
Une démarche économe et modulable
La démarche économe mise en oeuvre par la communauté de communes cible essentiellement trois pans de l’opération d’aménagement :
- La conception d’une liaison douce à des coûts acceptables,
- La capacité de réversibilité de la ligne ferroviaire,
- Le réemploi de l’infrastructure existante.
La démarche d’éco-conception a été retenue pour ce projet. De nombreux équipements pré existants ont été conservés, qu’il s’agisse des équipements ferroviaires ou des ouvrages d’art. De petites adaptations aux nouveaux usages ont parfois été nécessaires.
L’exigence de conserver et valoriser l’existant a permis de réaliser des économies importantes: en comparant la solution à celle d’un aménagement neuf, les dépenses d’investissement (hors coûts d’acquisitions foncières) ont été réduites de l’ordre de 50 % (source : Site vélo-route et voie verte du Sud).
Après quatre ans de mise en service, aucun problème majeur n’est apparu, ni au niveau de l’utilisation, ni au niveau de l’entretien, et les habitants se sont rapidement approprié cet aménagement. Cet axe devrait être complété, dans quelques années, par l’aménagement d’autres liaisons douces s’appuyant sur les chemins ruraux.
La fiche présente enfin les enseignements issus de cette démarche d’aménagement « temporaire ».
UN PARKING-RELAIS MODULABLE EN PÉRIODE ESTIVALE À ARCACHON
Une solution économe en prix et en foncier
La ville d’Arcachon accueille un grand nombre de visiteurs durant la période estivale, passant de 12.000 habitants à plus de 100.000, et souhaitait augmenter l’offre de stationnement en été.
Une solution économe a été trouvée: l’utilisation d’une gare routière scolaire, pour en faire un parking-relais à 2 km du centre-ville lors de la saison touristique, de la deuxième semaine de juillet à l’avant dernière semaine d’août.
Cela permet aussi de réduire la circulation en ville, où les places de stationnement sont pour la plupart limitées à 2 heures pour 3,20€.
Ce parking se situe près de la voie d’entrée dans le bassin d’Arcachon depuis l’autoroute. Pour transformer la gare routière, les blocs de béton qui maquent les emplacements des bus sont enlevés, et le marquage au sol est refait pour les voitures. 80 places pour les véhicules légers et 3 pour les personnes handicapées sont ainsi aménagées, ce qui permet d’offrir 174 places au total.
Un taux de remplissage de 80% en moyenne
Deux navettes gratuites accessibles aux personnes handicapées font des allers-retours vers le centre-ville en 5 minutes, et transportent entre 30 et 35.0000 personnes par saison. En 2015 le parking devenu payant (3€ la journée) a été équipé de trois horodateurs.
L’investissement nécessaire pour la première année a été de 50.000€, pour acheter les blocs de béton, puis 44.000€ par an (montage et démontage des blocs pour 4.000€, signalisation horizontale pour 10.000€, circulation des bus pour 30.000€).
Après plusieurs années d’exploitation, la solution a rencontré du succès puisque le taux d’occupation moyen est de 80%, parfois même de 100% certains week-end. En 2018, le nombre de visiteurs ayant utilisé le parking était de 380 personnes en moyenne par jour, ce qui représente 20% du nombre de visiteurs journaliers.
Du côté des recettes, qui augmentent chaque année, elles ont atteint 14.000€ en 2019, ce qui couvre 40% du coût de la navette.
Cette solution a un coût global bien inférieur à ce qu’aurait représenté la construction d’un parking neuf?
RECONVERSION D’UN PARKING EN PARC URBAIN À SAINT-ÉTIENNE
La ville de Saint-Etienne s’est engagée dans une démarche de renouvellement urbain, en transformant en profondeur les usages de ses espaces publics à des coûts maîtrisés. C’est dans ce contexte que le parc François Mitterrand a été aménagé sur un vaste parking, en mettant en oeuvre des solutions innovantes : production d’un plan-guide, concept d’économie inventive et mise en œuvre d’un stabilisé fertile.
Des solutions économes et innovantes
Les premières opérations d’aménagement de l’espace public ont été réalisées jusqu’en 2018 sous la maîtrise d’œuvre Alexandre Chemetoff & Associés liée à l’EPASE par un accord-cadre de maîtrise d’œuvre urbaine sur une durée de 9 ans. Ce contrat a porté sur l’établissement d’un plan-guide à l’échelle du projet général, sur les études de faisabilité, de programmation et de conception des espaces publics.
Le projet d’aménagement avait pour objectif de transformer en profondeur, sur 13 ha, un espace dédié principalement au stationnement automobile en un vaste parc urbain destiné avant tout aux Stéphanois. il assure plusieurs fonctions :
- mettre en relation divers équipements publics présents sur le site : parc des expositions, piscine, palais des spectacles, etc. ;
- offrir un parc naturel pour tous (aires de jeux pour les enfants, de pique-nique…) ;
- accueillir des manifestations ponctuelles comme la foire annuelle.
L’architecte en charge du projet a inventé le concept d’économie inventive, qui vise à utiliser moins de moyens et de matières premières en réutilisant et valorisant les éléments existants. Pour cela, un diagnostic précis des éléments disponibles a été réalisé. Par exemple, certains matériaux de revêtement (comme l’enrobé du parking) ont ainsi simplement été découpés afin de constituer une trame viaire à destination principale des piétons y compris des personnes à mobilité réduite.
Les aménagements sont ensuite complétés ou modifiés au gré des usages et de leur évolution.
Le stabilisé fertile, adapté aux piétons et aux véhicules
Un matériau innovant a été imaginé pour permettre la circulation des véhicules lors des différentes manifestations qui ont lieu sur le site: le stabilisé fertile.
Les couches de portance de l’ancien parking ont été préservées pour la stabilité, l’enrobé du parking a été recyclé en sous-couches de fondation, et la couche de surface est composée de matériaux drainant sur 20 cm, recouverts de terre végétale sur 6 cm.
1000 arbres ont été plantés, en fonction de leur résistance au changement climatique et de besoins d’entretien réduits.
L’aménagement du parc a coûté au total 74€/m², alors que pour un parc classique le coût à cette époque était autour de 250€/m².
L’aménagement du parc entraîne aussi des bénéfices sur le plan du climat: atténuation de l’îlot de chaleur, réduction de la surface de ruissellement, valorisation de l’eau de pluie qui arrose le stabilisé fertile.
UNE SOLUTION INNOVANTE POUR LE RETRAITEMENT EN PLACE D’UNE CHAUSSÉE POLLUÉE
La gestion des matériaux pollués de chaussées accroît considérablement les dépenses liées aux seuls travaux d’entretien. Pour faire face à cette problématique, le conseil départemental de Saône-et-Loire (CD71) s’est orienté vers un procédé innovant de réemploi de matériaux pollués.
Ce procédé a été expérimenté en 2017 sur 900 m de la RD62 dans la traversée de Demigny.
Une chaussée très polluée en milieu urbain
Dans le cadre des études préalables, plusieurs sondages et carottages ont été réalisés par le Cerema et la maîtrise d’œuvre en différents points et profondeurs (jusqu’à 35 cm), et ont mis en évidence des pollutions par hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) à des concentrations importantes (entre 1500 mg et 2500 mg/kg de masse sèche). Cette concentration empêchait toute valorisation de ces matériaux sur un autre chantier, imposant leur évacuation vers une installation de stockage ISDD.
L’entreprise Eiffage routes a proposé une technique innovante, Recyclean qui a été testé sous le contrôle du Cerema, afin de retraiter sur place des chaussées polluées en neutralisant les poussières et les polluants durant l’opération. Le retraitement est réalisé avec un engin spécial, sous cloche et à l’aide de liant hydraulique.
Le retraitement en place consiste à fragmenter, sur un linéaire d’environ 1 km, le corps de chaussée sur une profondeur de 30 à 35 cm. L’intégralité des matériaux déconstruits sont réemployés en sous-couche routière grâce au procédé innovant. Un procédé qui s’avère plus compliqué à mettre en oeuvre en milieu urbain et nécessite de grandes quantités d’eau.
Une solution économe
Ce procédé a plusieurs atouts, développés dans la fiche, notamment sur le plan économique: réduction des coûts de gestion des déchets (le coût du stockage en ISDD est de l’ardre de 70 à 500 € par tonne), réduction des achats de matériaux neuf, et une plus grande rapidité d’exécution qu’une reconstruction conventionnelle de chaussée.
Les avantages en termes environnementaux sont également importants, même en phase d’usage: si les HAP sont toujours présents, ils sont rigidifiés par le liant hydraulique ce qui prévient le risque de pollution. La fiche présente aussi une grille d’évaluation comparative entre la solution technique innovante et une solution classique d’entretien.