Après deux semaines de débats, les sénateurs ont, à la quasi-unanimité des présents (338 voix pour), adopté, hier par un vote solennel, le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. Seuls deux parlementaires du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE), Pierre-Yves Collombat et Marie-Noëlle Lienemann, s’y sont opposés. Le texte, dont l’examen par les députés débutera probablement courant novembre, devrait être définitivement adopté au début de l’année 2020. À quelques mois des élections municipales de mars, Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales, espère ainsi remédier à « la crise de l’engagement » des élus locaux. Les parlementaires, toutes tendances confondues, s’accordent toutefois à dire que ce texte ne représente ni un « big-bang » ni « une révolution » (les principales dispositions du texte ajoutées par le Sénat sont à retrouver dans Maire info d’hier).
Dans leur ensemble, les sénateurs se sont réjouis, au choix, de « petites améliorations » (Jean-Louis Masson, sénateur non-inscrit de la Moselle), d’« avancées » (Loïc Hervé, sénateur Union centriste de Haute-Savoie) ou de « réponses » visant à « faciliter au quotidien l’exercice du mandat de maire » et « mettre un coup d’arrêt aux irritants de la loi Notre » (Cécile Cukierman, sénatrice CRCE de la Loire). Avec ce texte, qui se veut une réponse aux attentes des maires exprimées au cours du Grand débat national du début de l’année (lire Maire info du 16 janvier), « le Sénat a souhaité faire passer un message clair : la commune représente tout pour nos concitoyens. L’intercommunalité n’est que le complément utile où se construit la mutualisation, mais la véritable collectivité, c’est la commune », a insisté Mathieu Darnaud, sénateur Les Républicains de l’Ardèche.
Une meilleure représentation des communes dans l’intercommunalité
L’ancien maire de Guilherand-Granges (Ardèche), comme plusieurs de ses collègues sénateurs – Loïc Hervé, Jérôme Durain (groupe socialiste, Saône-et-Loire), Josiane Costes (RDSE, Cantal) – ont salué la création d’une conférence des maires, qui devra se réunir au moins une fois par trimestre dans tous les EPCI, « sauf lorsque le bureau » de l’EPCI à fiscalité propre « comprend déjà l’ensemble des maires des communes membres ». Pour Josiane Costes, cette nouvelle instance « est le meilleur outil pour enrayer le sentiment de dépossession éprouvé par les élus. Les plus petites communes doivent être mieux représentées au sein des intercommunalités. L’intégration de l’accord local est, à cet égard, bienvenue ».
Quelques réserves ont, en revanche, été émises sur le volet « proximité » de ce texte. Jean-Louis Masson a taclé le premier : « Rien ne concerne la proximité, si ce n’est le titre du texte. Si l’on veut de la proximité, il faut mettre fin au gigantisme : grandes régions ou intercommunalités. Quand on regroupe une centaine de communes, des maires peuvent avoir une heure de route pour se rendre au siège de l’intercommunalité : est-ce cela, la proximité ? », a-t-il interrogé. Jérôme Durain s’est, lui aussi, étonné : « L’article 17 permettra aux intercommunalités de transférer à la région et au département des compétences qui leur auront été transférées par les communes : avouez que c’est très discutable quand on parle de renforcer la commune et la proximité ! »
« Attention aux hausses des indemnités »
« La crise de l’engagement n’est pas seulement liée aux problèmes de l’intercommunalité, aux pouvoirs de police ou au manque d’un statut de l’élu, recadrait Cécile Cukierman, mais aux difficultés qu’ont les élus de maintenir des services publics étatiques sur leur territoire : bureau de poste, gares, écoles, trésorerie… L’enjeu est la place de l’État : un État qui n’impose pas mais accompagne et sécurise l’exercice du mandat de l’élu local. »
Loïc Hervé a encore averti : « Attention aux hausses des indemnités, si elles doivent être financées par le seul budget communal : vous savez comme nous, monsieur le ministre, ce que c’est que le budget d’une commune de moins de 3 500 habitants ». « La rémunération des élus aurait mérité de donner lieu à des preuves d’amour supplémentaires de la part du gouvernement. La question des villes moyennes n’est, à cet égard, pas réglée », abondait, dans son sens, Jérôme Durain. Qui est aussi resté sur sa faim sur l’introduction de la parité dans les EPCI.
La conclusion est revenue à François Patriat : après avoir regretté que le texte n’ait « pas gagné en clarté ce qu’il a gagné en volume (de 32 articles au début de son examen, il en compte à présent 123), le sénateur La République en marche de Côte-d’Or a déploré « la suppression du Cif [Congé individuel de formation, ndlr] », qu’il juge « pas responsable ». « Tout mandat électif se mesure en trois temps. Souhaitons que le dernier, celui de la sortie soit valorisé par l’expérience des élus ». À ce sujet, le groupe socialiste du Sénat s’est félicité, dans un communiqué, avoir « obtenu que tous les adjoints s’ils sont salariés puissent bénéficier du droit à la suspension de leur contrat et leur réintégration de droit à l’issue de leur mandat ».
Accéder aux explications de vote.
SOURCE : MAIREinfo – Edition du mercredi 23 octobre 2019